Lorsque, au hasard d’une indolente balade du centre ville de la capitale auvergnate, on découvre la singulière boutique d’antiquités La fontaine au croisement de la rue des Chaussetiers et de la rue des petits Gras, la proposition d’Ariane Angeloglou dans son petit dictionnaire amoureux «L’art est une visite du temps» s’impose avec une évidence toute particulière.

Tout d’abord, le lieu. La maison où s’exposent les merveilleux objets au richissime et subjuguant passé n’est ni plus ni moins que la plus vieille demeure du centre ville. L’espace intérieur, chargé d’histoire, fascinant, a conservé ses splendides voûtes des XIIè et XVè Siècles. Fidèles à la conception des habitats du Moyen-Age, il y a bien sûr des salles inimitablement éclairées par les devantures donnant sur les deux rues mais aussi des coins et des recoins propices aux plus vertigineux voyages. A elle seule, l’historique demeure des Antiquités La fontaine mérite plus qu’un détour. Mais ce serait faire fi d’Hélène et Yves, les heureux maîtres de lieux qui font indéniablement figure de personnages de romans aux parcours de vie riches et rocambolesques. Lui, très tôt habité par la passion des antiquités, a exercé ses talents, entre autre, à Orange, Megève ou Saint-Ouen. Elle, passionnée par les beaux objets, leur a préféré leurs petits secrets à sa carrière de prof… bien-entendu d’histoire !

Depuis leur rencontre, ils s’adonnent à leur plaisir, c’est à dire, sillonner l’Europe passant de villes en villages pour découvrir la pièce rare, l’objet qui les fera vibrer, le petit bijou qui sommeille depuis des lustres au fond d’une vieille grange ou dans les malles oubliées d’un grenier.

Car Hélène et Yves aiment vraiment les antiquités. Ils avouent d’ailleurs spontanément ressentir une vraie déchirure lorsqu’il leur faut se départir d’une acquisition qui les a divinement bouleversés, mais ils ajoutent aussitôt que «c’est la loi du genre, c’est un peu la règle de la chasse au trésor». Leur appétit pour le beau n’a pas de limite et l’on comprend dès lors qu’ils ne se soient pas infligé le supplice de la spécialisation.

Il y a de même une poésie exquise dans les petites étiquettes qui présentent les objets. Elles invitent chacun, expert ou béotien en matière d’antiquités, à soulever le voile d’un silencieux passé qui se met soudain à raconter. Au hasard de votre visite parmi cette bouleversante collection d’insolites, vous êtes tour à tour fascinés et séduits par un bureau néo-colonial XIXè, une adorable statuette de geisha, un somptueux bureau cylindre Louis XVI finement marqueté et attribué à Demoulin, un guéridon Indochine époque Napoléon III, un superbe et rarissime meuble religieux Louis XIII ou par les somptueux lions en terre cuite du XIXè dont le style vénitien s’est parfaitement agrémenté au fil des saisons en extérieur de mousse et de lychens. Remarquables aussi les très beaux instruments de musique, violons, violoncelles voire même cithares en parfait état de marche.

Bref, vous l’aurez compris, la boutique d’Hélène et Yves est, à l’instar des grandes bibliothèques ou des prestigieux musées, un lieu où l’on aime aller se perdre pour mieux se retrouver, où les récits proposés sont de permanentes invitations aux vertigineux voyages, où la beauté esthétique célébrée rappelle l’absolue nécessité de ne se laisser émouvoir que par le sensible. Mais peut-on véritablement être surpris qu’avec le nom de ces antiquités, l’émotion et le plaisir coulent de source ?

CharlyM

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